Saviez-vous que 70 à 80% des charges de copropriété peuvent être récupérées auprès du locataire ? Cette répartition, souvent source de confusion et de conflits entre propriétaire bailleur et locataire, est pourtant strictement encadrée par la loi.
Les charges locatives, également appelées charges récupérables sur le locataire, représentent l'ensemble des dépenses initialement payées par le propriétaire mais qui peuvent légalement être récupérées à titre de remboursement. Il s'agit notamment des frais d'entretien liés au chauffage collectif, à l'entretien des parties communes, à l'électricité des ascenseurs ou encore à la taxe d'enlèvement des ordures ménagères.
Cette répartition n'est pas laissée au hasard : elle est fixée avec précision par le décret n° 87-713 du 26 août 1987, qui établit une liste exhaustive des charges récupérables. Comprendre cette réglementation est essentiel pour éviter les litiges et garantir une relation sereine entre propriétaire et locataire, qu'il s'agisse d'une location vide ou d'une location meublée.
A savoir : Ces règles diffèrent de celles applicables aux charges locatives en monopropriété où un seul propriétaire gère l'ensemble des charges.
Les charges de copropriété correspondent à l'ensemble des dépenses nécessaires au bon fonctionnement et à l'entretien d'un logement collectif. Elles se divisent en deux grandes catégories, chacune ayant des règles de répartition spécifiques.
Les charges générales concernent tous les copropriétaires sans exception. Elles comprennent :
Les frais d'administration : honoraires du syndic, organisation des assemblées générales, gestion comptable par l'agence immobilière
L'entretien courant : nettoyage des espaces communs, maintenance des équipements, petit matériel d'entretien
La conservation de l'immeuble : travaux de gros œuvre, ravalement de façade, réfection de la toiture
Ces charges sont réparties au prorata des tantièmes de chaque lot, en fonction de la quote-part détenue par chaque propriétaire dans l'immeuble.
Les charges spéciales ne concernent que les copropriétaires qui bénéficient effectivement des services financés. Elles incluent :
Les services collectifs : gardiennage, système de sécurité, interphone, connexion internet collective
Les équipements communs : ascenseur, chauffage central, production d'eau chaude sanitaire, éclairage des parties communes
Contrairement aux charges générales, leur répartition se fait selon l'utilité objective de chaque service pour chaque lot. Par exemple, un propriétaire du rez-de-chaussée ne paiera pas les charges d'ascenseur... sauf si celui-ci dessert le sous-sol où se trouve sa cave !
Parmi ces charges de copropriété, certaines peuvent être récupérées auprès du locataire : ce sont les charges locatives récupérables. Elles représentent généralement 60 à 80% du total des charges.
Exemple concret : L'eau utilisée pour nettoyer les escaliers et halls d'entrée constitue une charge récupérable car elle profite directement au locataire. En revanche, L'électricité est-elle une charge récupérable sur le locataire ? Non, car il doit souscrire son propre contrat d'électricité.
Le décret n° 87-713 du 26 août 1987 établit de manière exhaustive la liste des charges de copropriété récupérables auprès du locataire. Cette liste, complétée par de nombreuses décisions de justice, constitue la référence légale incontournable pour déterminer ce qui peut ou ne peut pas être refacturé.
Catégorie de charges | Charges récupérables | Détails |
Employé d'immeuble | Rémunération du gardien ou concierge | - 40% du salaire si nettoyage des parties communes OU gestion des poubelles - 75% du salaire si les deux tâches sont effectuées |
Ascenseur | - Électricité - Exploitation et entretien - Fournitures d'entretien - Petites réparations | ⚠️ Exclus : gros entretien, mise aux normes, remplacement |
Eau | - Eau chaude et froide collective - Eau des parties communes - Eau pour espaces extérieurs - Produits de traitement - Réparations des joints et fuites - Exploitation des compteurs | Tout usage collectif ou commun |
Parties communes intérieures | - Électricité - Fournitures d'entretien - Entretien vide-ordures - Réparations mineures - Frais de personnel d'entretien | Hall, escaliers, coursives, locaux communs |
Parties communes extérieures | - Entretien des voies de circulation - Entretien des parkings - Entretien des espaces verts - Équipements de jeux pour enfants | Jardins, allées, aires de stationnement |
Taxes et redevances | - Taxe ordures ménagères - Taxe de balayage - Redevance d'assainissement | Services dont profite directement le locataire |
1. La règle des 40% et 75% pour les gardiens
Cette spécificité souvent méconnue détermine la part récupérable du salaire du gardien selon ses missions :
40% récupérable s'il ne fait que l'entretien des parties communes OU la gestion des poubelles
75% récupérable s'il effectue les deux tâches
2. La colonne "charges récupérables" sur les décomptesLa plupart des syndics indiquent directement sur les décomptes de charges une colonne spécifique mentionnant les montants récupérables. Cette information facilite grandement le calcul des provisions pour charges.
3. Les charges spécifiques aux copropriétés de maisonsDans le cas de copropriétés constituées de maisons individuelles, les charges communes sont limitées. Les charges récupérables se résument souvent à la seule taxe d'enlèvement des ordures ménagères.
Cette liste officielle constitue votre référence absolue. Toute charge non mentionnée dans ce décret reste automatiquement à la charge du propriétaire, sans exception possible.
Le principe est simple : tout ce qui ne figure pas dans la liste du décret 87-713 reste à la charge du propriétaire. Il s'agit principalement des dépenses d'investissement, de gros entretien et de réparations importantes qui dépassent le cadre de l'entretien courant.
Les charges non récupérables comprennent notamment :
Ravalement de façade et réfection des peintures extérieures
Réfection de la toiture et réparation de charpente
Remplacement de gros équipements (chaudière, pompe de chauffage, groupe électrogène)
Mise aux normes des ascenseurs et réparations importantes
Travaux d'isolation thermique ou phonique
Rénovation complète des parties communes (sols, murs, plafonds)
Certains frais liés à la gestion de la copropriété restent également au propriétaire :
Honoraires du syndic de copropriété
Assurance de l'immeuble
Frais d'assemblée générale (convocations, compte-rendu, vote)
Honoraires d'avocat pour litiges de copropriété
Diagnostic technique global (DTG) et audits énergétiques
Type de charge | Propriétaire | Locataire |
Chauffage | Installation, remplacement chaudière, grosses réparations | Consommation, entretien courant, petites réparations |
Ascenseur | Mise aux normes, remplacement, gros entretien | Électricité, entretien courant, petites réparations |
Eau | Installation de compteurs, gros travaux de plomberie | Consommation, location compteurs, petites réparations |
Parties communes | Gros travaux, peinture, carrelage | Nettoyage, électricité, petit matériel d'entretien |
Impôts | Taxe foncière | Taxe ordures ménagères, taxe de balayage |
Sécurité | Installation système, remplacement | Entretien courant |
Pour les installations situées dans le logement même, la responsabilité du propriétaire s'étend aux :
Remplacement des équipements (chauffe-eau individuel, radiateurs, robinetterie)
Réparations importantes de plomberie ou d'électricité
Mise aux normes des installations électriques ou de gaz
Isolation des conduits et canalisations
Les charges mixtes : Certaines charges peuvent être partiellement récupérables. Par exemple, les frais de gardien se répartissent entre propriétaire et locataire selon les tâches effectuées.
La preuve de la récupérabilité : En cas de doute, c'est au propriétaire de prouver qu'une charge est récupérable en se référant au décret. Les charges douteuses restent automatiquement à sa charge.
L'évolution dans le temps : Les gros travaux votés en assemblée générale restent au propriétaire, même s'ils bénéficient indirectement au locataire (isolation, ravalement...).
Cette répartition claire protège le locataire contre des charges abusives tout en responsabilisant le propriétaire sur l'entretien de son patrimoine immobilier.
Le calcul des charges locatives varie selon le type de location et le régime choisi. En France, deux systèmes coexistent : le régime réel et le régime forfaitaire.
Pour les locations vides, le régime réel s'applique automatiquement. Voici comment procéder :
1. Estimation des charges annuellesBasez-vous sur le dernier décompte de charges de copropriété. Les provisions sont généralement estimées à 75% du montant versé au syndic.
2. Calcul de la provision mensuelleDivisez le montant annuel estimé par 12 pour obtenir la provision mensuelle.
Exemple concret :
Charges récupérables 2024 selon décompte syndic : 1 200 €
Provision mensuelle : 1 200 € ÷ 12 = 100 €
Le locataire paie donc 100 € de charges chaque mois
Une fois par an, comparez :
Total des provisions versées par le locataire (12 × provision mensuelle)
Charges réelles selon le décompte définitif du syndic
Trois cas possibles :
Cas 1 - Équilibre : Provisions = charges réelles → aucune régularisation
Cas 2 - Trop-perçu : Provisions > charges réelles → remboursement au locataire
Exemple : 1 200 € de provisions vs 950 € de charges réelles = 250 € à rembourser
Cas 3 - Insuffisance : Provisions < charges réelles → complément à payer
Exemple : 1 200 € de provisions vs 1 400 € de charges réelles = 200 € à réclamer
Pour les locations meublées, vous avez le choix entre régime réel et forfaitaire.
Simplicité : montant fixe sans régularisation
Prévisibilité pour locataire et propriétaire
Gestion simplifiée
Basez-vous sur les charges du locataire précédent
Estimez à partir des décomptes de charges récents
Le montant ne doit pas être "manifestement disproportionné"
Exemple :Si les charges réelles moyennes sont de 80 €/mois, vous pouvez fixer un forfait entre 70 € et 90 €.
Le forfait peut être révisé chaque année dans les mêmes conditions que le loyer, généralement selon l'IRL (Indice de Référence des Loyers).
Comment régulariser les charges récupérables ? Cette étape obligatoire qui doit respecter une procédure précise.
Attendez le décompte final du syndic (généralement 2-3 mois après l'AG)
Vérifiez la colonne "charges récupérables"
Ajoutez la taxe d'ordures ménagères si nécessaire
Formule : Charges réelles - Provisions versées = Régularisation
Exemple détaillé :
Provisions versées : 12 × 85 € = 1 020 €
Charges réelles récupérables : 920 €
Taxe ordures ménagères : 150 €
Total charges récupérables : 920 € + 150 € = 1 070 €
Régularisation : 1 070 € - 1 020 € = 50 € à réclamer au locataire
Document 1 - Décompte détailléDétaillez chaque nature de charges :
Chauffage collectif : 450 €
Eau froide/chaude : 320 €
Entretien parties communes : 150 €
Ascenseur : 150 €
Document 2 - Mode de répartitionExpliquez comment les charges collectives sont réparties dans l'immeuble (tantièmes, nombre de lots...).
Document 3 - Note d'informationPour le chauffage et l'eau chaude, précisez le mode de calcul utilisé.
Envoi des documents : au moins 1 mois avant le paiement
Délai de régularisation : avant le 31 décembre de l'année suivante
Conservation justificatifs : 6 mois après envoi du décompte
En cas de départ anticipé :
Demandez un arrêté intermédiaire au syndic
Ou conservez 20% du dépôt de garantie jusqu'à la régularisation
Depuis 2015, la transparence sur les charges locatives s'est renforcée avec de nouvelles obligations.
Ce document doit présenter :
Détail par nature : électricité, eau chaude, eau froide, ascenseur, entretien...
Montants précis pour chaque poste
Calcul de la régularisation (provisions - charges réelles)
Format recommandé :
Décompte charges 2024 - Appartement [numéro] - Chauffage collectif : 456,78 € - Eau froide/chaude : 234,56 € - Entretien p. communes : 123,45 € - Ascenseur : 78,90 € Total charges récupérables : 893,69 € Provisions versées : 960,00 € Trop-perçu à rembourser : 66,31 €
Expliquez clairement :
Base de répartition (tantièmes, quote-part, forfait...)
Votre quote-part dans la copropriété
Calcul spécifique pour certaines charges (ex: ascenseur selon étage)
Pour les systèmes collectifs, détaillez :
Répartition des frais de chauffage
Mode de calcul (compteurs individuels, répartiteurs...)
Période de référence pour l'eau chaude
Tarification appliquée
Sur demande du locataire, vous devez pouvoir fournir :
Factures des prestataires (chauffage, entretien...)
Contrats de maintenance
Décompte syndic original
Relevés de compteurs
Délai de conservation : 6 mois après envoi du décompte
Modalités : courrier recommandé ou email avec accusé de réception
Droit d'accès : le locataire peut consulter sur place ou demander copies
L'absence de justificatifs peut entraîner :
Refus de paiement légitime du locataire
Action en justice pour obtenir les documents
Annulation de la régularisation en cas de procédure incorrecte
Bon à savoir : Outre la gestion des charges, les propriétaires doivent aussi anticiper d'autres coûts comme le prix d'un permis de louer dans certaines communes. Il est aussi important de savoir quand faut-il demander le permis pour mettre en location pour éviter tout retard dans la mise en location de votre bien
Le paiement des charges de copropriété suit un calendrier précis qu'il est important de respecter pour maintenir de bonnes relations locatives.
Les charges locatives se paient chaque mois avec le loyer
Elles apparaissent séparément sur l'appel de loyer
Format type : "Loyer : 800 € + Charges : 120 € = Total : 920 €"
Virement automatique recommandé pour éviter les oublis
Une seule fois par an, généralement entre janvier et mars
Après réception du décompte définitif du syndic
Délai de paiement : généralement 30 jours après réception du décompte
Si la régularisation n'a pas été effectuée avant le 31 décembre de l'année suivante :
Le locataire peut exiger un paiement étalé sur 12 mois
Droit applicable même en cas de charges importantes
Évite les difficultés financières ponctuelles
Exemple : Une régularisation de 600 € en janvier 2026 pour les charges 2024 peut être étalée à 50 €/mois de janvier à décembre 2026.
Option 1 - Arrêté intermédiaire :
Demande au syndic d'un décompte à la date de départ
Régularisation immédiate au moment de l'état des lieux
Coût supplémentaire (50-100 € généralement)
Option 2 - Conservation du dépôt :
Rétention de maximum 20% du dépôt de garantie
Régularisation lors de l'arrêté annuel
Restitution du solde dans les 2 mois
Payments acceptés :
Virement bancaire (recommandé pour traçabilité)
Chèque avec mention "charges locatives [mois/année]"
Prélèvement automatique (pratique pour la régularité)
À éviter :
Espèces (pas de preuve de paiement)
Compensation avec le loyer sans accord écrit
Les litiges sur les charges locatives sont fréquents. Voici comment les résoudre efficacement.
Avant toute action :
Vérifiez vos calculs et les documents fournis
Comparez avec le décompte de syndic original
Contactez directement le propriétaire par écrit
Demandez des explications détaillées
Si le dialogue n'aboutit pas :
Lettre recommandée avec accusé de réception
Motifs précis de contestation (charges non récupérables, erreurs de calcul...)
Délai de réponse (généralement 1 mois)
Pièces justificatives à l'appui
Modèle de contestation :
Objet : Contestation régularisation charges locatives 2024 Madame, Monsieur, Suite à réception de votre décompte du [date], je conteste la régularisation pour les motifs suivants : - Honoraires syndic imputés à tort : 150 € - Erreur calcul eau chaude : montant correct 245 € et non 295 € Je vous demande de rectifier ces erreurs et vous adresse copie du décompte original en annexe. Cordialement,
Service public gratuit et accessible
Médiation entre les parties
Recherche de solutions amiables
Durée : 2-3 mois en moyenne
Comment saisir :
Contacter la mairie ou le tribunal judiciaire
Remplir le formulaire de saisine
Joindre tous les justificatifs
Attendre la convocation
Spécialisée dans les litiges locatifs
Gratuite et rapide (1-2 mois)
Recommandations non contraignantes mais influentes
Bonne préparation aux éventuelles procédures judiciaires
En dernier recours :
Assignation du propriétaire
Frais d'huissier et d'avocat (parfois obligatoire)
Durée : 6 mois à 2 ans
Décision contraignante
Points essentiels :
3-5 ans pour réclamer des arriérés de charges
Même délai pour contester un trop-perçu
Point de départ : connaissance effective de l'erreur
Conservation de tous les justificatifs recommandée
Transparence dès le départ : présenter clairement les charges dans le bail
Communication régulière : informer des évolutions en cours d'année
Justificatifs complets : toujours fournir tous les documents requis
Calculs vérifiés : double-contrôle avant envoi
Réactivité : répondre rapidement aux questions du locataire